Masters 2023, jour 3 : l’or pour Evgeniia Lopareva et Geoffrey Brissaud, Camille et Pavel Kovalev, Adam Siao Him Fa, et Léa Serna

A l’issue de la danse libre Evgeniia Lopareva et Geoffrey Brissaud remportent leur première victoire de la saison sur les notes de Rachmaninoff. Une nouvelle direction artistique pour eux après le Piaf de l’année dernière, dans laquelle ils sont déjà très à l’aise. Les mouvements sont fluides et délicats, parfois plus rapides, presque violents. Les portés sont tous de niveaux 4, ils peuvent encore amélioré la diagonale et la séquence de pas sur un pied. Ils empochent 116.42 points et 197.56 points au total.

Geoffrey : « Première victoire, mais non sans mal ! On a chuté à l’entraînement ce matin et j’ai un ligament qui a été touché, on n’a pas vraiment pu patiner comme on le voulait ; ça reste une danse libre correcte vue nos attentes. »
Evgeniia : « La musique de Mylène Farmer pour la rhythm dance, c’est Romain [Haguenauer] qui l’a choisie, moi j’ai aimé tout de suite ! » 
Geoffrey : « J’étais un peu plus dubitatif, mais ils me l’ont bien vendu ! C’est un choix original, différent, qui se démarque, c’est ce qu’on voulait. C’est très années 80, une musique française, on est Français, les mondiaux sont à Montréal, il y a une certaine logique. »
Evgeniia : « Pour la danse libre, Rachmaninoff est également un choix que j’ai proposé, pour la première musique. J’avais d’autres idées, d’autres extraits en tête pour la suite, mais Guillaume [Cizeron] a tenu à la deuxième musique, qui s’insère plus dans la continuité. »
Geoffrey : « On a beaucoup travaillé la gestuelle avec Guillaume pour exploiter tout le côté classique de Rachmaninov ; ce n’est pas simple, il faut aller parfois jusqu’au bout des doigts ! C’est ce niveau de détail que l’on veut atteindre, pour passer du bon et aller côtoyer l’excellent, pour aller chercher la médaille européenne et plus si possible. Tout en gardant notre côté puissant, agressif parfois. La vie de Rachmaninoff n’a pas été simple, il a fait une dépression, il a été expatrié… on s’en inspire pour exprimer toute une palette d’expression sur la glace. Pour la suite, on part demain matin à 10h à Shangaï ! »

La deuxième place de Marie Dupayage et Thomas Nabais n’est pas si surprenante sachant que Loïcia Demougeot et Théo Le Mercier ont déclaré forfaits pour le libre, nous espérons les revoir très vite en pleine forme. Marie et Thomas ont quant à eux proposé une nouvelle danse aboutie, initiée sur ‘Mechanisms’ de Kirill Richter et terminée sur le piano tout doux de Bach, dans une composition de programme rapide/lent assez inhabituelle. Ils repartent avec 179.13 points dont 107.55 points sur le libre.

Natacha Lagouge et Arnaud Caffa sont 3èmes avec 103.18 points sur le libre et 165 points tout rond sur ‘River’ de de Bishop Biggs. Toujours de belles lignes et une bonne couverture de piste, très plaisantes pour les yeux.

Lou Terreaux et Noé Perron sur ‘Solitude’ de Sofiane Pavart et ‘Je suis malade’ version Dalida finissent 4èmes avec 97.37 points sur le libre et 156.90 points au total. Ils complètent une belle compétition de danse dans l’ensemble, ce qui se retrouve sur les feuilles de scores où les juges n’ont donné aucune note d’exécution négative.

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Après une entame de programme compliquée (triple Lutz retourné, triple Salchow chuté) Léa Serna a réussi à se reconcentrer pour dérouler la suite de son libre sur ‘Padam’ de Patricia Kaas sans accroc, avec une fin de programme où double Axel-double Axel, triple Lutz-double boucle piqué et triple flip sont bonifiés. Elle remporte ces Masters avec 185.35 points grâce aussi à son avance du court, car elle est 2ème du libre avec 118.73 points.

Léa : « C’est bien de retrouver la compétition, après un été tumultueux ! J’ai quitté Poitiers mi-juin, et j’ai essayé plusieurs options, en faisant des stages d’une semaine à Oberstdorf, à Courmayeur, à Anglet… J’avais la possibilité de choisir mon nouveau cadre d’entraînement, j’ai beaucoup voyagé et pas mal vécu dans ma voiture !  Je suis ensuite partie 10 jours à Montréal pour monter mes programmes, en me disant qu’à mon retour j’aurai pris ma décision. Je me suis bien sentie à Oberstdorf, j’y suis donc depuis un mois avec Michael Hurth. Je m’entends bien avec Claude Peri donc c’est elle qui m’accompagne sur ces Masters, mais je suis bien basée en Allemagne désormais. L’ambiance est chouette, avec Lukas Britschgi, le médaillé de bronze aux derniers championnats d’Europe, Davide Lewton-Braine, les deux meilleures allemandes… ça créé une bonne émulation, et on partage le même vécu ; je ne suis pas seulement entourée de patineurs juniors qui réussissent tous leurs sauts à l’entraînement en me disant que je n’ai plus le même taux de réussite.
Comme souvent à chaque changement d’entraîneur il y a plusieurs points techniques qui sont revus, il y a des mauvaises habitudes à perdre. Je suis encore en plein dedans ! La plus grosse différence est que je fais moitié moins de sauts qu’avant, et le temps gagné est passé à faire des éducatifs et à répéter des parties de programme. Je commence tout juste mais ça me permet de gagner sur mes transitions.
Le choix de mes musiques… C’est suite au World Team Trophy, où j’ai eu un déclic. J’étais en réussite au niveau technique, mais en revoyant les vidéos je me suis trouvée ennuyeuse sur la glace, c’est tout ce que je ne veux pas être ! Les musiques rapides ne sont pas pour moi, je me suis inspiré des programmes d’Isabeau Levito pour essayer un nouveau style. C’est comme ça que j’ai trouvé les musiques de mes deux programmes.
Sur cette compétition je suis plutôt satisfaite, le court était très bon, et le libre pas si mauvais. Sur le début de programme je n’étais pas dans mes appuis, mais la séquence double Axel-double Axel et le triple Lutz sont les éléments sur lesquels j’ai le plus de réussite aux entraînements. Ils se retrouvent en fin de programme, dans mes derniers sauts, où je récolte le plus de points ; c’est une stratégie qui m’a souvent servi par le passé car ça me permet de rester concentrer et de ne rien lâcher car je sais que c’est là que je peux faire la différence, c’est comme si mon libre ne commençait qu’après mon 4ème saut. »

Lorine Schild gagne le libre avec 119.8 points et repart en argent, engrangeant 173.49 points sur la compétition. Grosse combinaison triple Lutz-triple boucle piqué dès les premières secondes, le second Lutz qui suit n’est pas déclenché. Hormis le triple boucle réceptionné avec les mains, la suite est sans erreur, avec six triples sauts au compteur, le tout sur ‘Hell to the liars’ de London Grammar.

Maïa Mazzara a comme Léa commencé son programme sur ‘The Feeling begins’ dans le dur, avec une chute sur le triple flip et un simple Lutz. Elle se rattrape ensuite avec une fin de programme solide et quatre autres triples sauts, certes avec quelque fois un manque de rotation. Comme elle le précise, ‘les six minutes d’échauffement se sont bien passées, du coup je me suis trop concentrée sur la réussite de mes premiers sauts, et pas sur ma technique, alors que sur le triple boucle j’ai laissé mon corps faire, et ça s’est beaucoup mieux passé. J’ai été blessée cet été, j’ai passé trois mois sans sauter, je n’ai repris les sauts que mi-juillet avec des simples et des doubles, je n’ai en fait que trois semaines derrière moi où j’ai pu vraiment enchaîner les difficultés. Ca fait du bien de retrouver la compétition, la dernière fois était en janvier dernier.’ Maïa remonte à la 3ème place du libre avec 95.54 points et repart en bronze (139.20 points).

Maé-Bérénice Méité a fait tout ce qu’elle a pu, mais elle est clairement un cran en dessous en ce début de saison. Elle tente par deux fois le triple Lutz, qui est chuté et doublé, et également le boucle, retourné et également doublé. Un peu à court d’énergie en fin de programme sur ‘I surrender’ de Céline Dion, avec un autre double saut, Maé reviendra en meilleure forme, c’est une battante !

Clémence Mayindou termine 5ème avec 125.28 points dont 80.34 points sur le libre, son triple flip passe avec un retournement.

Sophia Maarouf complète le classement avec 74.08 points sur le libre et 116.99 points au total.

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Camille et Pavel Kovalev remontent d’une place pour remporter une nouvelle fois les Masters avec 173.17 points dont 122.64 points sur le libre. Pas d’erreurs majeures, les éléments sont là : triple Twist, double Salchow parallèle, séquence triple boucle piqué-double boucle piqué-simple Axel, puis les deux sauts lancés (flip et Salchow) en fin de programme, sur la thématique de James Bond.

Camille : « Cette compétition aura été difficile, on enchaîne tout très vite en ce début de saison. On n’a clairement pas encore retrouvé le niveau de la fin de saison dernière. On est partis en stage chez Silvia Fontana et John Zimmerman cet été, c’était vraiment bien, mais les deux semaines et demi ont été finalement très courtes, c’était un peu frustrant pour tout le monde car on n’a pas eu le temps de faire du travail de fond, il fallait retrouver la condition physique après les vacances et tout de suite préparer la compétition américaine. D’autant plus qu’après cette compétition, on a gardé la musique du court et les costumes, et changé tout le reste ! On a déplacé l’ordre de toutes les difficultés pour ne pas courir après les éléments du programme, et ne plus avoir de dépassement de temps. On en rentrés lundi dernier, on a travaillé essentiellement le programme court depuis. Sur le programme libre on a également changé la séquence chorégraphique pour être plus à l’aise, c’est la première fois qu’on le refaisait en entier ici à Villard.
Nos musiques de programme… sur le court c’est une musique qu’on avait trouvée il y a longtemps, on a eu du mal à la retrouver, et même pour Maxime Rodriguez qui a fait l’arrangement ça n’a pas été simple de la localiser. Disons que c’est ‘Prince of Persia’, ou plutôt le titre que le DJ qui l’a travaillée lui a donnée. Pour le libre, c’est basé sur du James Bond, on a eu l’idée sur la tournée, mais il y a aussi du Mission Impossible, c’est un peu plus diversifié.
Prochaine compétition pour nous … la semaine prochaine ! Laurent [Depouilly, leur entraîneur] nous a dit qu’il fallait faire plusieurs compétitions pour améliorer notre Word Ranking, c’est ce qu’on fait ! On aura le temps de repasser à Paris lundi et mardi, et mercredi on s’envole pour la Finlande. »

Avec un programme solide Aurélie Faula et Théo Belle s’emparent de la 2ème place du libre (103.96 points) et repartent en argent (152.36 points). Belle réussite sur les sauts lancés et les portés, il reste à solidifier les sauts parallèles.

Premiers après le programme court, Oxana Vouillamoz et Flavien Ginoux n’ont pu conserver leur place et repartent en bronze pour quelques dixièmes de points (152.09 points) et la troisième place du libre (100.69 points). Si le triple Twist d’entrée a une hauteur impressionnante, les autres éléments sont plus compliqués : Flavien chute sur le triple Salchow, Oxana sur le triple boucle piqué, et le triple Salchow se termine également sur la glace. Ils ont toutefois le mérite de tenter le plus dur, l’expérience devrait finir par parler.

Noel-Antoine Pierre et Lori-Ann Matte engrangent eux cette expérience dont ils ont tant besoin. Sur la musique aérienne de ‘Wait’ par M83 (rappelez-vous un certain programme de Kevin Aymoz, du même groupe…), ils tentent le triple Salchow lancé, les autres sauts sont en double. Ils terminent avec 93.10 points sur le libre et 138.89 points au total.

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Chez les couples juniors, Romane Télémaque et Lucas Coulon remportent la compétition avec 119.70 points au total dont 76.78 points sur le libre, leurs concurrents directs Louise Ehrard et Matthis Pellegris ayant malheureusement dû déclarer forfaits suite à une mauvaise chute à l’entraînement ce matin.

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Adam Siao Him Fa réalise un énorme programme libre aujourd’hui à Villard de Lans, avec quatre quadruple sauts (Lutz, Salchow et boucle piqué par deux fois) ainsi que deux triples Axel, l’un étant en séquence avec double Axel. On sent son expérience sur le Lutz, le dernier triple est en peu en déséquilibre, qu’il masque par en enchaînement avec euler et double Salchow. Il empoche rien moins que 200.84 points sur le libre et 302.71 points sur la compétition.

Adam : « C’était un bon programme libre, même si le début était un peu difficile, je me sentais mou, j’ai eu du mal à me mettre dans la glace. Je réalise mon meilleur score, et de loin, mais c’est bonus, je me concentre sur mes programmes avant tout. Je fais un bon début de saison, c’est encourageant de passer les quatre quadruples et les deux triples Axel, j’engrange de l’expérience pour les Grands Prix à venir. D’ailleurs tout de suite après le gala je pars pour le Shangaï Trophy.
Le Lutz est mon meilleur saut, celui sur lequel je me sens le mieux. Après les mondiaux aux Japon, j’ai eu un déclic sur ce saut pour passer les quatre tours, m’entraîner avec les meilleurs mondiaux a été très positif ; j’ai pris quelques trucs de ci de là, pour ensuite pouvoir peaufiner des détails techniques pour gagner en régularité. Je suis en ce moment à environ 80-90% de réussite sur ce quadruple. L’objectif est d’atteindre ce chiffre sur les autres quadruples ; pas le boucle que je ne travaille pas, mais le flip passe bien. Il n’est pas question de l’incorporer dans un programme, pour l’instant je cherche à gagner en stabilité, mon contenu technique ne devrait pas beaucoup changer ces prochains mois.
Mon objectif pour ce début de saison est de me qualifier pour la Finale du Grand Prix, je pense que j’ai mes chances. Ce n’était pas un but en soi l’année dernière, mais j’y ai cru même après ma contre-performance sur le programme court du NHK. Pour la deuxième partie de saison je verrai ensuite.
J’ai aussi appris le backflip cet été, c’est un élément que j’ai toujours voulu apprendre ! J’ai bien sûr mis beaucoup de protections, ça a servi car par deux fois je suis parti en sur-rotation, mais plus de peur que de mal. »

Kevin Aymoz est deuxième de la compétition avec 164.09 points sur le libre et 262.00 points au total. Le choix du ‘Boléro’ de Ravel n’est pas forcément très original, mais Kevin se l’approprie et nous en livre une version très personnelle, avec une chorégraphie aboutie et ressentie jusqu’au bout des doigts, gantés de rouge. Le quadruple boucle piqué est là, le triple Axel en séquence avec double Axel est de toute beauté. Quelques approximations sur boucle, doublé, et le Lutz, chuté par deux fois. Rien de grave pour un début de saison, on sent que Kevin a pu enfin laisser derrière lui ses pépins physiques et se préparer plus sereinement. Comme Adam, ses pirouettes et sa suite de pas sont de niveau 4. Nous avons la chance d’avoir deux excellents patineurs qui espérons-le iront côtoyer le plus haut niveau à l’international. Autres nouveautés, les cheveux plus longs et la barbe de trois jours lui vont bien.

François Pitot remonte d’un cran sur ‘Cry me river’ de Michael Bublé pour repartir en bronze avec 220.57 points au final dont 146.46 points sur le libre. Ses sauts sont généralement maîtrisés, même s’il doit faire parler l’expérience pour tenir ses dehors arrière de ses triple Axel. La chute sur triple Salchow n’aura au final pas de grandes conséquences.

Luc Economidès termine lui au pied du podium avec 212.45 points. Son libre, qu’il reprend de l’année dernière sur les musiques de Chaplin, lui rapporte 133.32 points. Il tente le quadruple Salchow mais le retourne, ne déclenche pas le premier triple Axel et retourne le deuxième. Son triple Lutz est par contre à garder en tête tant il est bien réalisé, alors qu’il ne tourne le deuxième qu’en double et chute sur le double boucle piqué de la combinaison.

Landry Le May est 5ème avec 202.77 points, dont 130.31 points sur le libre où il a exécuté deux belles tentatives de quadruples (Salchow, boucle piqué).

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En patinage synchronisé, la victoire chez les juniors est pour les Flammes de Wasquehal, qui gagnent donc une place malgré une chute toute bête sur des croisés arrières. Les Jeanne d’Arc, pourtant plus rapides sur la glace et avec un patinage déjà plus ‘senior’ ont eu trop d’approximations, comme sur les croisements où les patineuses avaient tendance à se toucher. Elles repartent néanmoins avec la meilleure note de composantes.

Dans les rangs séniors, les Zoulous de Lyon sont toujours désespérément seuls… Ils leur manquaient même un patineur, il est rare de voir une équipe de 15 sur la glace ; ils présentent néanmoins un programme dynamique avec quelques erreurs (pirouette assise non tenue, un porté qui ne monte pas) à corriger sur la suite de la saison.

En bonus, quelques photos des podiums…