Interview de Florent Amodio et de son entraîneur lors des Mondiaux de Turin

(Propos recueillis par Brice Dequaire)
 

Florent Amodio lors des Master’s d’Orléans (Photo Laëtitia Mériguet)

1/ Cette première saison en senior a été très riche pour toi, elle a commencé au mois de septembre avec les Master's à Orléans, elle se termine ici à Turin avec une 15ème place. Quel bilan tires-tu de toutes ces compétitions ?

 

Florent: Cette compétition résume la saison, elle s'est finie en beauté. C'est une année qui s'est passée à merveille avec plein de cadeaux, les Jeux Olympiques, les Championnats du Monde, la Coupe de Russie, le Skate America, je gagne les Master's et les Championnats de France élites. Cette saison a été très chargée, j'ai eu du mal à me remobiliser après Vancouver, mais je voulais absolument me battre. Mes entraîneurs ont joué un rôle essentiel dans cette optique. C'était important d'y aller pour emmagasiner de l'expérience et pour apprendre à gérer toutes les situations. Il fallait que je me prouve que j'étais capable. J'ai fait un beau combat ici à Turin, je suis heureux pour ça. 
 

Florent Amodio lors des Master’s d’Orléans (Photo Laëtitia Mériguet)

2/ Tu as vécu beaucoup de nouvelles expériences en peu de temps, tout ceci à 19 ans. Quels enseignements retires-tu de tout ça ?
 
Florent: Oui, c'est cool. Il y a quelque chose à faire, c'est sûr. A moi de travailler pour améliorer ma technique et mes points faibles. On a vu que j'étais présent sur ces Championnats du Monde et qu'il y avait une marge de progression pour les années à venir. 
 
 
3/ Après les Championnats de France de Marseille et ta victoire, la Fédération Française t'avait demandé de choisir entre les Championnats d'Europe de Tallinn et les Championnats du Monde. Regrettes-tu ce choix ?
 
Florent: Non, je ne regrette pas, c'est fait. Je n'ai pas eu mon mot à dire non plus, mais c'était mieux comme ça, je n'aurai pas pu faire les trois compétitions physiquement (euros, J.O, mondiaux). Après les Jeux, j'ai vraiment ressenti une fatigue morale et physiquement la chute a été très dure à mon retour de Vancouver. Les J.O et les Mondes, ce n'est pas rien, je suis content d'avoir obtenu ces deux compétitions et de ne pas avoir gâché mes chances. 
 
 
 
4/ Souhaites-tu changer tes deux programmes pour la saison à venir ?
 
Florent: Oui absolument. J'ai plein d'autres choses à montrer. Le public vient de me découvrir et de voir une bonne palette de ce que je peux faire, mais j'ai plein d'idées. Je suis impatient de monter de nouveaux programmes et de bosser tout ce qui n'a pas marché cette année. 
 
5/ Tu avais travaillé avec plusieurs intervenants pour les chorégraphies de tes programmes l'été dernier, Stanick Jeannette pour le programme court, Tyler Myles et Alexander Zhulin pour le libre. Vas-tu renouveler l'expérience pour tes futurs programmes ?
 
Florent: Oui, on va être ambitieux. Il n'y a aucun nom de défini pour le moment, une réunion est prévue prochainement. J'ai envie de voir les meilleurs et d'avoir de beaux programmes. Je veux garder cette originalité et avoir quelque chose qui me colle à la peau pour m'amuser et continuer de faire le show. Les décisions vont bientôt être prises. Je souhaite garder cette touche de fraicheur pour les années à venir. 
 

Florent Amodio lors du gala de Bercy le 3 avril dernier (Photo Laëtitia Mériguet)

6/ Vas-tu enrichir le contenu technique de tes programmes pour la prochaine saison ?
 
Florent: On va continuer de travailler les quadruples, j'ai vu que j'étais capable de le faire, ça sera l'un des gros points. Je dis les quadruples, car je travaille le Salchow et le boucle piqué. Le contenu technique de mon libre était déjà une barre au-dessus par rapport à la saison précédente. Il y a une progression chaque année, c'est normal. On ne va pas se griller et faire tout d'un coup bêtement. J'ai déjà commencé à faire le quad en compétition, on va continuer dans ce sens. Pour le programme court, il faudra vraiment que je sois sûr à 100% pour inclure le quadruple. Mais sinon, je resterai dans la même optique, je me place sur le programme court avec une belle combine triple-triple. J'ai vu cette saison que cette stratégie était payante. 
 
 

Florent Amodio (Photo Laëtitia Mériguet)

7/ Quel est ton point de vue sur les modifications que l'ISU a apportées cette année dans l'organisation des Championnats d'Europe et du Monde ? Réduction des patineurs qualifiés pour les finales, ce premier groupe du libre à l'écart des autres, votre départ le lendemain du programme libre.
 
Florent: On ne s'est pratiquement pas vu en fait entre patineurs de l'équipe de France. Maintenant, on fait notre travail et on s'en va. Cela gâche un peu la fête entre guillemet. On ne décide pas, si on pouvait décider, ça ne serait pas comme ça. Le premier groupe à l'écart des autres, ce n'est pas sport du tout. 
 
 
8/ En tant qu'entraîneur, quel est votre regard sur la saison de Florent et sur son évolution ? Vous avez une complicité qui est très forte puisque vous l'entraînez depuis qu'il a 4 ans. 1er français et 12ème des J.O sans avoir pu faire de Championnats d'Europe et du Monde avant, ce n'est pas anodin.
 
Bernard Glesser: Oui, c'est énorme. C'est un très très gros travail que Florent a produit lors des entraînements, cela a payé. Aujourd'hui encore, j'ai été tout à fait satisfait du travail qui a été accompli sur son programme libre. C'est une très bonne saison. 
 
 
9/ Est-ce que le fait d'être arrivé lundi soir à 21h à Turin et de ne pas avoir eu d'entraînement dans la patinoire de compétition avant l'échauffement du programme court a perturbé Florent ?
 
Bernard Glesser: Tout à fait, complètement. On s'est rendu compte en arrivant ici que le dernier entraînement sur la grande patinoire avait eu lieu lundi après-midi. Comme nous sommes arrivés lundi soir à Turin, nous n'avons eu que deux entraînements sur la seconde patinoire avant le programme court. Florent a donc découvert la grande piste mercredi après-midi lors de l'échauffement du short program. 
 
10/ Qui a choisi la date de votre arrivée à Turin, la Fédération Française ?
 
Bernard Glesser: Je pense oui. 
Florent: Oui, c'est la Fédération. Brian est arrivé dimanche en milieu de journée. Je lui ai posé la question « Pour quelle raison es-tu arrivé avant ? » et il m'a répondu qu'il avait fait la démarche de demander pour arriver plus tôt, alors que pour notre part cette date nous a été imposée. Ce choix est un peu bizarre, car c'est un Championnat du Monde tout de même. Arriver sans entraînement sur la grande patinoire lors de l'échauffement du programme court et prendre ses repères, c'est difficile. Je n'étais pas 100% confiant non plus à cause des trois semaines d'entraînement qui ont suivi les J.O et qui ont été très dures. J'ai perdu des points sur le programme court, j'ai très bien sauvé les meubles sur le libre. Cette date d'arrivée, c'est un petit détail qui a cloché ! 
Bernard Glesser: C'est étonnant même, étonnant que la Fédération Française ait fait ce choix. On aurait plutôt tendance à faire confiance d'habitude.
 
11/ A propos de la Fédération Française, cette dernière organise régulièrement des tests de forme pour les patineurs. Quelle est votre opinion sur ce point ? Est-ce positif pour les patineurs ? 
 
Bernard Glesser: Si la FFSG souhaite organiser des tests, c'est qu'elle estime que c'est nécessaire de revoir les athlètes avant les compétitions. Si un patineur est près pour aller sur une échéance, ce n'est pas un problème de se présenter quelques jours avant et montrer le contenu de son programme. 
 
 
12/ Pour terminer Florent, que voudrais-tu dire aux personnes qui ont apprécié ton évolution cette saison ?
 
Florent: Un grand merci à tout le public, cette année a été énorme. J'ai vu qu'il y avait un grand engouement autour de moi, je tiens vraiment à remercier les spectateurs. Si je fais du patinage, c'est pour ça. Réaliser 20 quadruples dans un programme, ça ne me passionne pas forcément, j'ai envie de faire le show pour donner du plaisir. Je vais bosser à fond pour continuer sur cette lancée et qu'on s'amuse encore longtemps ensemble.
 
A la suite du gala de Bercy le 3 avril dernier, le champion de France a été invité par Evgeni Plushenko pour effectuer plusieurs dates de la tournée du vice-champion Olympique en Roumanie, Slovaquie et République Tchèque.

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