Interview de Nathalie Péchalat et Fabian Bourzat lors des Mondiaux de Turin

Nathalie Péchalat et Fabian Bourzat lors des Championnats d’Europe de Tallinn au mois de janvier dernier (Photo BD)

Propos recueillis par Brice Dequaire

1/ Quelle est votre impression sur votre saison qui a pris fin ici à Turin avec cette 4ème place ?
Nathalie : Je suis contente qu'elle soit finie, elle a été très longue. Maintenant, on est enfin le premier couple français et ça change pas mal de choses. On a eu du mal à trouver notre voie sur le programme libre cette année, on l'a beaucoup modifié. Ces changements nous ont motivé, mais ça nous a fatigué aussi. On a eu l'impression de patauger un peu par moment, on savait où on allait, mais il a fallu changer tellement de choses que ce travail a été assez harassant. C'est la raison pour laquelle nous avons repris notre libre de l'année dernière sur ces Championnats du Monde. Je suis contente, car nous avons décroché la petite médaille de bronze avec ce programme libre, c'est la première fois pour nous. (ndlr: Lors des Championnats d'Europe et du Monde des petites médailles sont décernées aux patineurs en dehors du podium officiel pour le programme court, mais aussi pour le programme libre). La saison se termine bien, on a fait de bonnes performances. On a juste un regret sur la médaille des Championnats d'Europe. 
 
 

Nathalie Péchalat et Fabian Bourzat lors d’un gala à Brest en 2009 (Photo Laëtitia Mériguet)

2/ Avez-vous avez un petit regret sur le choix du thème que vous avez fait cette saison pour votre programme libre ?
Nathalie : Je pense qu'on avait un bon thème, la musique était bonne. Le problème, c'est qu'il n'y avait pas l'histoire pour relier les deux avec nous. Ce programme nous collait moins à la peau que notre libre sur le Cirque. Nous avons bien réussi à retranscrire notre danse country, la danse originale, on a voulu montrer que l'on savait faire autre chose sur le libre pour mettre en évidence le résultat de notre travail à Moscou, mais tout n'a pas fonctionné. Ce programme libre manquait de cohérence entre le thème, l'histoire et la musique. On a vraiment fait de notre mieux, on l'a beaucoup modifié, il était très bien aux Jeux Olympiques. Le cirque a tellement été apprécié la saison dernière qu'il a été difficile de voir au-delà de ce programme. C'est ce que les juges nous ont dit cette année. 
 

 

Nathalie Péchalat et Fabian Bourzat lors du Trophée Bompard au mois d’octobre dernier (Photo Florence Lécrivain)

3/ Vers quelle direction voulez-vous aller l'année prochaine et avec quel chorégraphe ? 

Fabian : Je pense que c'est Alexander Zhulin qui va monter nos programmes. Nous allons commencer par travailler les nouvelles séries de pas, les nouveaux portés, les éléments en général. Dès que l'on aura une bonne vision de la chorégraphie, on fera venir les intervenants pour spécifier le travail chorégraphique pour aboutir à ce que nous voulons. 

Nathalie : Nous voulons prendre un thème qui colle à nos personnalités, un thème enjoué. On va monter toute la trame avec Alexander, c'est important que l'on construise ce libre aussi bien que le cirque a été construit, dans l'ordre des éléments, dans le timing. On avait vraiment bien réussi ce programme sur tous les plans, sur le plan stratégique. On va essayer de faire quelque chose de similaire avec notre entraîneur, pour avoir du patinage, pour montrer l'amplitude, le déplacement, la propreté dans les suites de pas et pour avoir de bonnes transitions. Ensuite, nous allons travailler avec des personnes extérieures au milieu du patinage, comme nous faisons tous les ans. Pour la danse originale, on ne va pas prendre de risque, on va vraiment le monter avec notre coach et travailler avec des chorégraphes pour donner du style. 

4/ Quel est votre avis sur la suppression de la danse imposée ? Est-ce positif ou négatif ?
Nathalie : Je pense que c'est bien de la supprimer pour les seniors, mais de là à la remettre à l'intérieur d'une danse originale. On va voir, on va essayer de faire du mieux possible. La danse originale commençait à devenir vraiment sympa avec les musiques chantées, avec les folklores où chacun pouvait apporter de l'originalité et montrer une différence. Ce n'était pas comme il y a deux deux ans où tout le monde avaient pris des folklores russes, c'était plaisant pour le public. Là, on va retrouver un système de 24 valses à regarder, dont un tour complètement imposé. Honnêtement, j'ai un peu peur que cela soit ennuyeux pour les spectateurs. Il faut que la danse sur glace évolue. 
 
5/ Souvent, l'argument donné par les défenseurs de cette épreuve est qu'elle représente l'équivalent des gammes pour le piano, mais n'a-t-elle pas un côté franchement désuet ?
Nathalie : C'est la raison pour laquelle il faut garder cette épreuve jusqu'en junior, mais pour les seniors ? C'est rébarbatif, oui. Pour moi, c'est l'épreuve qui se rapproche le plus de l'ancien système, on fait un peu ce que l'on veut. Comme on a changé d'entraîneur, il y a de nouvelles petites choses qui sont apparues. Avec le même prof et les mêmes corrections, je pense que c'est très ennuyeux. J'étais super contente d'avoir une danse originale sur les années 50, 60, 70, je me suis dit qu'il y allait avoir plein de possibilités, mais quand l'annonce a été faite il y a deux jours à propos de la Valse d'Or, j'ai été déçu. Ce n'est pas encore définitif, mais ça va être voté au mois de juin, il y a de grosses chances pour que ça passe. Ils vont se rendre compte dans un an que ce n'est pas possible. Le programme va être plus long, ça va faire une série, un élément, un élément, un élément, paf paf c'est fini. J'ai l'impression que l'ISU souhaite que la danse sur glace avance et finalement on fait un retour en arrière monstrueux. J'ai la même impression chez les hommes, plus besoin de faire de quad, on est revenu dans les années 90 et encore. Ce règlement sert beaucoup les couples artistiques, c'est devenu vraiment top, ils dansent ensemble, il se passe des choses. Les filles pour moi, c'est hyper ennuyeux. C'est dommage, il y a des filles qui sont supers, mais c'est ennuyeux à mourir. 
 

Nathalie Péchalat et Fabian Bourzat lors d’un gala à Brest en 2009 (Photo Laëtitia Mériguet)

6/ Ce système de jugement a beaucoup standardisé les programmes. Les meilleurs arrivent à s'en sortir, mais on retrouve beaucoup les mêmes portés, les pas sont très souvent assez rébarbatifs. Quel est votre avis sur ce point puisque vous avez aussi connu l'ancien de système à l'inverse des jeunes couples ?
Nathalie : Le niveau de base, le niveau de patinage a énormément évolué depuis le nouveau règlement. Je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose. Pour les jeunes couples, voire même pour les très jeunes, ceux qui ont 12-13 ans, ils vont prendre les portés faciles, c'est sûr, pour avoir des niveaux et ça ne va pas forcément développer leur créativité. Sauf que quand on est plus grand et que l'on sait faire plus de choses, c'est là qu'il faut essayer d'être plus créatif, tout en restant dans le règlement pour obtenir des niveaux 4. Quand je regarde le niveau des Jeux Olympiques cette année par rapport aux Jeux de Turin en 2006, ce n'est pas comparable. 
 

Nathalie Péchalat et Fabian Bourzat lors du Trophée Bompard au mois d’octobre dernier (Photo Florence Lécrivain)

7/ Souhaitez-vous continuer jusqu'aux Jeux Olympiques de Sotchi en 2014 et avec quel entraîneur ?
Fabian : On restera à Moscou, il n'y a pas de doute à avoir là-dessus. Avec Nathalie, nous ne sommes pas des partisans du retour en arrière. Pour les gens qui se posent la question si on retournera à Lyon, il en est hors de question. 
Nathalie : Le but, c'est d'aller jusqu'à Sotchi, après il faut voir si on est dans un bon état de forme et si on progresse dans les résultats. Nous irons jusqu'aux Championnats du Monde en 2012, c'est sûr. L'objectif c'est quand même Sotchi, après si c'est pour se battre pour une 5 ou 6ème place, on ira pas. Pour moi les Jeux Olympiques, c'est soit on a une médaille, soit on en a pas. 
 

 

 
 
8/ Quelle est votre opinion sur les modifications que l'ISU a apportées cette année dans l'organisation des Championnats d'Europe et du Monde ? Réduction des patineurs qualifiés pour les finales, ce premier groupe du libre à l'écart des autres, votre départ le lendemain du programme libre.
Nathalie : Je suis d'accord sur la réduction des groupes de patineurs pour la compétition. Il faut aussi penser aux spectateurs qui ont à rester dans la patinoire 2h30. Si on a envie de regarder une compétition, je pense que trois groupes, c'est déjà long, surtout s'il y a des gens qu'ils veulent voir deux épreuves dans la même journée. Six groupes d'entraînement au total, c'est déjà pas mal. C'est triste pour les patineurs qui ne sont pas dans les 16 premiers, c'est vrai. Sur le fait que les patineurs doivent repartir le lendemain de leurs épreuves, là je ne suis pas d'accord, ce n'est pas normal. Florent, Vanessa et Yannick, on les a vu deux ou trois jours à Vancouver, même pas. Ici, j'ai croisé Florent dans les couloirs de l'hôtel, peut-être deux fois « Salut ça va ? Ouai ça va, je pars à l'entrainement » Bon, super ! On ne se voit plus, il n'y a plus d'équipe de France. Déjà que la tournée de l'équipe de France a été annulée, maintenant on ne passe plus les Championnats ensemble. Les Grands Prix, je n'en parle pas, on se retrouve pratiquement toujours tout seul avec Fabian. C'est dommage, car l'équipe de France est sympa aujourd'hui, on s'entend tous bien…..plus ou moins bien. Il y a une bonne énergie normalement, on rigole beaucoup ensemble, on partage plein de trucs. Vanessa et Yannick sont repartis jeudi matin, on ne les voit pas, on ne les voit plus, on se croise, c'est horrible ! Il n'y a que Brian que l'on voit, car nous restons Fabian et moi ainsi que Brian pour le Gala ici à Turin. 
9/ Avez-vous été invité au gala de Bercy ? (le 3 avril dernier)
Nathalie : Oui, nous avons été invités. Le problème est que nous avons été prévenus beaucoup trop tard, il y a deux semaines. On nous avait proposé des galas au Japon depuis deux mois, quand on nous a dit que la Tournée de l'équipe était annulée, on s'était déjà engagé.

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