Mondiaux 2022, jour 1 : Kaori Sakamoto prend une option pour le titre dès le court dames

Les championnats du monde 2022 s’ouvrent aujourd’hui à Montpellier, dans un contexte très particulier. La situation sanitaire encore incertaine nous oblige à des tests journaliers et au respect strict des gestes barrières, alors que la non-participation des patineurs russes et chinois laisse la porte grande ouverte aux autres nations, dans des mondiaux post-olympiques traditionnellement déjà propices aux révélations de nouveaux talents.

Les dames ouvrent le programme de ces championnats.

Sans surprise, Kaori Sakamoto, la favorite de la compétition en l’absence des patineuses russes, s’impose facilement avec 5 points d’avance pour un total de 80.32 points. Nouveau record pour elle, elle laisse éclater sa joie dans le Kiss and Cry !  Ce qui frappe surtout sur son programme court, patiné sur la musique de ‘Gladiator’, c’est son aisance, sa sécurité dans l’exécution des difficultés techniques. Elle se détache nettement de ses concurrentes sur ce point, elle semble patiner en chaussons ! Aucune hésitation, tout est glissé, rapide, avec une grande classe. Quel déplacement sur le double Axel d’entrée ! Il récolte d’ailleurs des +5 chez quasi tous les juges. Triple Lutz et triple flip-triple boucle piqué ne sont qu’une formalité, elle récolte même un 10 de la part du 2ème juge pour la note de performance.

On sait Loena Hendrickx blessée, elle porte d’ailleurs un gros bandage au niveau de la cuisse droite. Plus d’un l’ont d’ailleurs laissée hors du podium dans leurs prédictions… Mais sur 2mn40, Loena fait sensation sur ‘Caruso’, avec son aisance habituelle. Aucun problème sur les sauts, la combinaison triple Lutz-triple boucle piqué est un peu heurtée, certes (avec la seule note d’exécution négative que les juges lui ont attribuée), sinon tout le reste est très bien exécuté, entre +3 et +4. Avec 75 points tout rond, elle prend une solide deuxième place, espérons qu’elle pourra tenir aussi bien son programme libre après-demain.

Avec 72.55 points, Mariah Bell réalise sa meilleure performance de la saison ; elle termine sur ce programme court en 3ème position, et meilleure patineuse américaine. Mariah peut être un peu friable sur la combinaison triple-triple, elle la tente avec succès aujourd’hui sur la musique de ‘A river flows in you’ de Yiruma. Un petit manque de rotation, des notes d’exécution qui s’en ressentent logiquement, c’est le seul accroc du programme, les autres sauts (triple Lutz et double Axel) sont propres. Joli programme, bien porté par la chorégraphie et l’interprétation, un bon moment.

Mariah :
Je suis très contente ! Je fais mon meilleur score de la saison, c’est comme une rédemption après les JO. Je n’étais pas sûre si j’allais tenter triple-triple ou triple-double… après tout je me suis dit que je n’avais rien à perdre, j’ai tout tenté, et c’est passé ! Je n’ai pas de coach ici, seulement Adam en facetime. Il m’a également conseillé de faire selon ce que je sentais. Ce matin la triple-triple est bien passée aux entraînements, et encore tout à l’heure aux 6 minutes d’échauffement. Par contre je ne la tenterai pas dans le libre, je présenterai le même contenu technique qu’aux JO.

Se remobiliser après les Jeux, ce n’étais pas évident, c’est une grosse compétition, la plus importante d’une carrière ! Une semaine après, j’ai participé à Art on Ice, c’est vraiment plus relax et fun à faire, tout en continuant à s’entraîner un peu. Je suis rentrée ensuite aux US, ça m’a fait une bonne base pour reprendre.

Je n’ai pas de recette qui expliquerait ma réussite aujourd’hui, hormis que je me repose et que je dors beaucoup ! Mon premier jour ici, j’ai dormi jusqu’à une heure de l’après-midi. Ensuite je me suis entraînée, mais avec la juste dose, seulement ce dont j’avais besoin. Apparemment c’est la bonne méthode ! Je n’ai pas d’objectif en termes de placement, je veux juste faire de bons programmes et m’amuser sur la glace. C’était déjà mon ambition pour les championnats nationaux, raisonner suivant le placement final est trop lourd à porter.

Avec moins d’un demi-point de retard (72.08 points) et la 4ème place, Young You peut encore croire au podium. Elle ne tente pas son triple Axel aujourd’hui, mais son double Axel est quasiment aussi long que celui de Kaori. Plus dans la retenue au niveau de l’interprétation sur ‘Whirling Winds’ de Ludovico Einaudi, elle paye également au niveau technique un manque de rotation sur la combinaison et une carre incertaine sur le flip.

Alysa Liu peut également croire au podium, également si elle sort son triple Axel dans le libre. Double Axel aujourd’hui pour un programme propre, solide, sans extravagance sur ’Gipsy dance’ de Ludwig Minkus. Elle fait ce qu’elle sait faire, avec un triple flip, et une combinaison triple Lutz triple boucle piqué réussis. Avec 71.91 points et la 5ème place provisoire, elle n’est qu’à quelques dixièmes de la breloque.

Nicole Schott se bonifie au fil de la saison ! Elle est 6ème avec 67.77 points. Elle semble avoir eu raison de tenter encore et toujours sa combinaison triple flip-triple boucle piqué, car elle est vraiment nette, comme aux championnats d’Europe. Elle se hisse tout juste dans le dernier groupe, mais le podium sera dur à atteindre.

Prétendante à la médaille, Wakaba Higuchi est en retard avec 67.03 points et la 7ème place. Sur sa musique très douce de ‘Your song’ de Elton John, chantée par Ellie Goulding, Wakaba part sur le triple Axel, mais s’arrête à deux tours et demi en l’air, avec une réception retournée. Elle perd beaucoup de points, alors que le reste du programme est très glissé, avec de belles réceptions sur triple Lutz-triple boucle piqué et triple flip. Elle aura besoin de son triple Axel pour remonter dans le libre.

Karen Chen est elle 8ème avec 66.16 points. Dommage, vraiment dommage… alors qu’elle commence très bien son programme avec triple Lutz-triple boucle piqué (à rotation incomplète pour les juges) et double Axel, elle ne déclenche pas son triple boucle. D’habitude à l’aise sur ce saut, elle est à la peine sur cet élément depuis plusieurs semaines maintenant, avec plusieurs échecs aux Jeux Olympiques. Etrange qu’elle n’ait pas choisi un autre saut comme triple au choix, pour assurer un programme propre. Par contre, c’est une patineuse qui gagne à être vu en live : on se rend beaucoup mieux compte de ses qualités d’interprétation, et de la vitesse de ses pirouettes.

Madeline Schizas, 10ème avec 64.20 points, réalise une nouvelle fois un programme solide, sans erreur majeure. Elle s’impose véritablement comme la meilleure patineuse canadienne, qui arrive à enchaîner les bonnes performances. Triple Lutz-triple boucle piqué, triple flip, double Axel ne lui posent aucun problème, sur les notes de ‘My sweet and tender beast’ par Evgeni Doga.

Madeline :
Mon programme court était bon, je suis assez contente, surtout qu’il y a eu des hauts et des bas depuis les JO. J’ai été malade avec le covid, en ce moment c’est mon entraîneur qui est positif, ce n’est pas évident. J’ai malgré tout réussi à me remobiliser pour ces championnats. Mon meilleur score de la saison me situe environ dans le top 10, c’est mon objectif ici, pour pouvoir ramener deux places pour l’année prochaine. A plus long terme je vise les JO de Milan, je suis donc repartie pour un cycle de 4 ans. J’aimerai y remporter une médaille, mais nos vies en ce moment sont très difficilement prédictibles, tout peut arriver, on verra.

Le triple Axel ? Oui, je le travaille, j’étais assez proche de le réussir l’été dernier, je l’atterrissais avec un retournement. Ensuite pour l’année olympique, l’objectif était surtout de patiner propre, il n’était plus au programme. Peut-être pour l’année prochaine !

Kailani Craine assure sa qualification pour le programme, elle est 22ème avec 56.64 points. La combinaison triple boucle-triple boucle, qu’elle est la seule à présenter, n’est tournée qu’en triple-double, le reste du programme étant par ailleurs solide. Elle prend le pari de patiner sur ‘Heart of glass’ de Bondie, mais dans une version où la rythmique et les percussions puissantes se font attendre… et n’arrivent jamais, ce qui laisse une tension tout le long du programme.

Kailani :
C’est vraiment génial d’être ici et de patiner devant un public, je me sens vraiment chanceuse ! C’est ce que j’aime avant tout, comme dans les galas, emporter le public avec moi, le faire sourire ; l’atmosphère ici est vraiment chouette, les Français encouragent beaucoup. J’étais assez relax pendant les 6 minutes, je le prends un peu comme un entraînement, alors que je peux être plus stressée sur les entraînements justement. Je commence à avoir l’habitude, c’est de plus en plus confortable.

Sur ce programme court, c’est vrai que la musique semble ne jamais commencer, il y a cette tension qui perdure, mais de mon côté après l’Axel je suis déjà plus relax ! Au départ cette musique je n’en ai entendu qu’une toute petite partie. Je connaissais le thème bien sûr, mais pas cette version. Ce n’est que beaucoup plus tard que mon coach me l’a fait écouter, ça faisait au moins un an que je la cherchais ! J’aime vraiment beaucoup patiner dessus, il faut croire que j’étais destinée à le faire.

Patinant deuxième de la compétition, Léa Serna rate malheureusement son programme. Habituellement très à l’aise sur les sauts piqués, Léa part à la faute sur triple flip, pourtant son saut préféré, alors que la combinaison triple Lutz-triple boucle piqué est considérée par les juges à rotation incomplète. Le double Axel est pourtant très bien exécuté, avec une belle amplitude, preuve que ses approximations passées sur ce saut sont de l’histoire ancienne. Avec 54.30 points, Léa termine 29ème du programme court, et n’est donc pas qualifiée pour le programme libre, pour un point et demi.

Léa :
Je suis dégoutée, je n’ai pas les mots. Ce programme mérite tellement mieux, je ne lui ai pas rendu hommage. J’ai pris plaisir sur la chorégraphie, mais je continue à répéter les mêmes erreurs sur les sauts, je vais trop vite, je me précipite. Il n’y a qu’à une seule compétition où j’ai réussi à prendre mon temps. C’est très décevant, aussi bien sur le piqué que sur le flip. Alors que je me balade aux entraînements sur la combinaison triple Lutz-triple boucle piqué, et que le triple flip est mon meilleur saut. Là je n’ai que le double Axel en positif, les points sont beaucoup trop bas, je ne passerai pas le cut pour le libre.

A noter que les niveaux 4 pleuvent sur les éléments non-sauts, à savoir les trois pirouettes et la suite de pas. Parmi les patineuses qualifiées pour le libre, il faut chercher jusqu’à la 20ème place de Lari Naki Gutman pour trouver le seul niveau 2, sachant que Jenni Saarinen, 25ème et non qualifiée pour le libre, est la première au classement à n’avoir pas au moins trois niveaux 4.

Preuve que les patineuses travaillent énormément la technique de base… ou que le referee est généreux !

Quelques mots de la cérémonie d’ouverture, que j’ai trouvé un peu courte. Dommage que le défilé des drapeaux n’ait pas eu lieu, remplacé par un simple enchaînement sur l’écran géant, c’est généralement très visuel. On a pu néanmoins revoir sur la glace Valentina Marchei et surtout Surya Bonaly, la marraine de l’évènement.

Moment particulièrement émouvant après les mots d’introduction de Nathalie Péchalat et de la représentante de l’ISU : une minute d’applaudissement pour les patineurs ukrainiens, qui ont réussi à s’extraire de leur pays pour venir patiner en France.