Beaucoup d'erreurs ont été commises au cours d'une soirée de tension extrême et Yuzuru Hanyu devient champion olympique malgré deux chutes. Il devance Patrick Chan et Denis Ten, qui surprend une nouvelle fois après les Mondiaux l'an passé. On retiendra également des adieux olympiques particulièrement émouvants : Brian Joubert évidemment, mais aussi Daisuke Takahashi, Jeremy Abbott ou Tomas Verner.
Yuzuru Hanyu restait sur plusieurs échecs sur le quadruple Salchow et tenter ce saut d'entrée était un pari risqué. Une chute fragilise sa quête de l'or, et lorsqu'il trébuche à nouveau sur un triple flip après avoir pourtant réussi un quadruple boucle piquée, il semble avoir perdu le fil de son programme. Mais comme souvent cette saison, il se reprend lors de la seconde partie et enchaîne les difficultés techniques, proposant notamment deux combinaisons avec triple Axel. S'il espérait forcément mieux patiner, c'est suffisant pour emporter la médaille d'or en consolidant son avance du court, et devenir le premier patineur japonais champion olympique. Si la récompense est formidable alors qu'il a progressé chaque année depuis son titre mondial junior, elle n'est pas un aboutissement sur le plan de la performance et il aura certainement d'autres occasions de briller avec davantage de réussite et de présence artistique.
Patrick Chan était en difficulté sur l'Axel depuis plusieurs mois et deux échecs, le premier sur un triple retourné, le second sur un double, lui coûtent le titre. Trop fébrile et nerveux, avec également un main posée à la réception du second quadruple boucle piquée, il n'a pu se libérer pour profiter des erreurs d'Hanyu. La frustration est grande pour le champion du monde en titre, dont l'avance sur les composantes grâce à un programme artistiquement supérieur ne lui permet même pas de devancer le Japonais sur le libre. Ce semi-échec olympique ne doit cependant pas ternir une carrière riche en titres, et ce premier podium aux Jeux est aussi une satisfaction. Son avenir sportif est pour l'instant en pointillés et il devra prendre le temps pour décider s'il souhaite ou non poursuivre la compétition.
Denis Ten a saisi sa chance comme aux Mondiaux 2013. Médaillé d'argent inattendu l'an passé, il s'empare de la médaille de bronze olympique après seulement une neuvième place sur le court (mais il n'était qu'à quelques points du podium). Contrairement à la plupart de ses concurrents, il n'a pas craqué et a réussi toutes les difficultés majeures : quadruple boucle piquée, deux triples Axel et deux combinaisons triple-triple. Des réceptions approximatives sur ses deux derniers sauts sont alors sans conséquences. L'interprétation peut décevoir et il manque d'intensité expressive, mais sa capacité à donner le meilleur de lui-même lors des grands évènements lui permet d'atteindre son objectif.
Javier Fernandez se contente de la quatrième place. Il a réalisé deux quadruples sauts mais transforme sa troisième tentative en triple Salchow….cette modification lui coûte cher puisque le second triple Salchow, dernier élément-saut, est invalidé (car considéré comme une quatrième combinaison- on ne peut répéter le même triple saut qu'en combinaison- alors que trois sont autorisées). Cette erreur n'est pas la seule à le priver de podium puisqu'il ne passe le Lutz qu'en double. Moins convaincant artistiquement que l'an passé, ce résultat est donc très frustrant par rapport à son potentiel.
Tatsuki Machida est cinquième, en ayant réalisé un programme propre mis à part une chute d'entrée sur le quadruple. Il replace ensuite un quadruple boucle piquée en combinaison, puis deux triples Axel. Son programme manque cependant de nuances, de personnalité et il peut être satisfait de ce classement pour sa première grande compétition internationale. Il devance son compatriote Daisuke Takahashi, sixième pour ses derniers JO. Daisuke a tout donné mais il lui a manqué du temps pour se rétablir complètement après une blessure au genou : le quadruple est incomplet, comme sur le court et le second triple Axel est aussi en sous-rotation. La performance technique est donc insuffisante même s'il cherche à compenser par la glisse et l'interprétation. Il n'a pas de regrets à avoir et il va quitter prochainement la compétition avec un grand palmarès (champion du monde et médaillé olympique, multiple champion national).
Han Yan a réussi un formidable triple Axel puis une combinaison quadruple-triple, mais n'a pu enchaîner et prend la septième place finale. Encore très jeune (pas encore 19 ans), l'ancien champion du monde junior devra être plus ambitieux sur sa chorégraphie pour proposer un patinage plus complet et mettre davantage en valeur ses qualités de glisse. Peter Liebers, huitième, n'a pas tenu la pression de patiner dans le dernier groupe, chutant sur le quadruple boucle piquée et retournant le triple Axel. Une place dans les dix premiers reste cependant un excellent résultat pour lui.
Jason Brown, qui patinait en dernière position, a convaincu par son enthousiasme rare, sa joie de patiner mais lui aussi a multiplié les erreurs techniques. Le triple Axel n'est pas stabilisé et il réalise un élément-saut supplémentaire après un faux-départ sur le double Axel (comptabilisé alors qu'il retente et réussi le même saut une poignée de secondes plus tard). Sa neuvième place est déjà un tremplin et s'il poursuit sa progression linéaire, il pourra viser bien plus haut très vite.
Michal Brezina et Tomas Verner prennent les dixième et onzième places. Brezina a réussi deux quadruples mais échoué sur des sauts moins difficiles (simple Axel, double Salchow). Verner a aussi proposé un programme inégal mais il s'agissait d'un de ses meilleurs libres récents et le champion d'Europe 2008 quitte les Jeux Olympiques avec le sourire et le sentiment d'un devoir accompli.
Jeremy Abbott, douzième, a lui aussi achevé un cycle avec beaucoup de fierté. Courageux hier après sa chute sur le quadruple boucle piquée, il a offert sur le libre un programme abouti, propre techniquement même s'il ne tente logiquement pas le quadruple. S'il n'aura pu au cours de sa carrière acquérir le tempérament et les certitudes d'un compétiteur, le quadruple champion des Etats-Unis aura beaucoup transmis par sa sensibilité, sa fragilité et ses nuances émotives.
Brian Joubert, treizième, a perdu des places après le court mais ce constat n'est pas l'essentiel tant il a pu profiter de ces JO. Il a tout tenté en plaçant deux quadruples d'entrée et il était trop juste pour tenir physiquement l'intégralité du programme, même s'il n'a pas démérité. Il achève ainsi une grande carrière, marquée par un titre mondial, trois titres européens et de nombreux podiums internationaux. Son départ laisse forcément un grand vide dans le milieu du patinage français.
Pour Florent Amodio, le programme libre a été de nouveau révélateur d'un vide puisqu'il prend la dix-huitième place finale sans avoir pu donner le meilleur de lui-même. Les considérations sportives semblent cependant secondaires puisque son mal-être était perceptible à l'issue de la compétition.
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