Bilan 2010-2011 : Messieurs

Canada

Cette saison post-olympique aura été largement dominée par Patrick Chan, vainqueur de la finale du Grand Prix, champion national, puis champion du monde pour la première fois de sa carrière. Débutant sur le quadruple boucle piquée en ouverture de la saison, il a pu acquérir très rapidement une régularité sur ce saut, ce qui lui a permis de compenser le manque de fiabilité de son triple Axel. 
Il s'envole sur la note technique aux Mondiaux grâce la réalisation de trois quadruples sur ses deux programmes, et sa qualité de glisse lui offre toujours les composantes les plus élevées du plateau. Cette notation est discutable, car la composition des programmes et son expression sont largement perfectibles, mais son succès ne souffre aucune discussion . Il possède encore une nette marge de progression, et on peut espérer qu'il puisse se remettre en cause et poursuivre bien d'autres objectifs. 
 
Derrière Chan, la relève canadienne n'a pas vraiment convaincu. Shawn Sawyer a pu quitter la compétition en beauté grâce à une très belle seconde place au championnat national, alors que Kevin Reynolds a presque toujours déçu mis à par un programme court à deux quadruples (tirant profit des modifications du règlement). Ses lacunes techniques et ses faiblesses artistiques sont pour l'instant trop importantes. Enfin, Andrei Rogozine a remporté le titre mondial junior, mais n'a pas encore donné de garanties au niveau supérieur. 
 

Japon

Le patinage japonais a confirmé son impressionnante densité au plus haut niveau. Mais c'est celui dont on attendait le moins qui a finalement connu la plus grande réussite : Takahiko Kozuka a pris davantage confiance en ses possibilités, remportant deux Grand Prix et le championnat national. Il achève sa saison avec une médaille d'argent aux Mondiaux, grâce à un splendide programme libre. Son patinage léger, fin, presque aérien dans sa facilité, lui a permis d'exprimer tout son potentiel, avec une belle sensibilité, qui peut encore davantage s'affirmer. 
 
Daisuke Takahashi, par contre, a connu des difficultés et n'a pu confirmer son titre mondial. S'il fut intense et passionné dans l'expression, sa condition physique fut insuffisante pour rivaliser avec les meilleurs dans les échéances importantes. Un incident lors du libre des Mondiaux sonne comme une fin amère, mais il aura à coeur de se reprendre lors de la saison prochaine. Pour proposer à nouveau le meilleur de lui-même.
 
Nobunari Oda laisse, comme les saisons précédentes, une impression de frustration. Parfois brillant, il est trop vite rattrapé par la tension, et ne parvient pas à concrétiser un immense potentiel. Une énième erreur d'interprétation du CoP le prive d'un podium mondial, et il pourrait bien avoir laissé passer sa chance même s'il aura d'autres occasions. 
Yuzuru Hanyu, champion du monde junior 2010, a montré de belles promesses pour sa première saison en senior : second aux Quatre Continents, il pourrait vite se mêler à la lutte pour les sélections aux Mondiaux. 
 

Etats-Unis

Côté américain, Jeremy Abbott a déçu en ne parvenant pas à se qualifier pour les Mondiaux. Il a connu des problèmes de patins à l'entraînement, et n'a jamais pu livrer une prestation aboutie, malgré sa motivation et sa sensibilité. Il aura aussi une revanche à prendre la saison prochaine.
 
Ryan Bradley remporte le titre national;  c'est une jolie récompense de fin de carrière pour un patineur enthousiaste, malheureusement trop limité techniquement pour rivaliser avec les meilleurs. Ross Miner et Richard Dornbush ont découvert les Mondiaux pour la première fois avec un relatif succès mais ils manquaient d'expérience et de maturité pour faire davantage impression.
 
Tout comme Abbott, Adam Rippon n'a pas connu les résultats espérés, et devra se remettre en question. Attention car la relève est dense, prometteuse, avec encore tout à prouver il est vrai.
 

Europe

Au niveau européen, le patinage français a marqué la saison de son empreinte avec un formidable doublé à Berne. La seconde place de Brian Joubert récompense sa combativité, des choix chorégraphiques affirmés, et montre qu'il reste un immense compétiteur malgré le poids des ans. Même en l'absence de médaille mondiale, sa saison est réussie avec également un titre de champion de France. Et il peut encore briller à l'avenir, si sa condition physique lui laisse la possibilité d'exprimer tout son potentiel. 
 

Photo Laetitia Mériguet

La victoire de Florent Amodio fut l'apothéose d'une formidable première partie de saison, avec notamment une très belle seconde place au Bompard. Amodio a pour lui une aisance d'expression, un charisme lui permettant de soutenir une euphorie, de convaincre avec des programmes pourtant proches d'une exagération et d'une caricature.

C'est toute l'ambiguité d'une saison exceptionnelle sur le plan des résultats, mais qui aura provoqué des attentes presque excessives et des polémiques inutiles (à l'image de l'utilisation des paroles aux Mondiaux, qui a éclipsé une performance satisfaisante).
Florent a encore bien des choses à prouver, avec une immense marge de progression. Souhaitons qu'il puisse évoluer la saison prochaine dans un climat relativement serein, alors qu'il devra se renouveler sur le plan musical, au-delà du statut de jeune premier.
 

Photo Florence Lécrivain

Le patinage russe a connu une embellie à domicile avec la troisième place presque inespérée d'Artur Gachinski aux Mondiaux. Il obtient ce classement grâce à une excellente prestation technique, alors que la composition du programme oscille entre le moyen et le médiocre. Il devra absolument progresser sur ce plan s'il veut s'installer durablement au plus haut niveau international. Konstantin Menshov, champion national, a pris une place d'honneur aux Euros, mais il est déjà proche de la fin de carrière, alors que personne ne s'est vraiment affirmé cette saison en juniors.

 
Tomas Verner a pu faire oublier les désillusions de sa saison olympique, grâce à une médaille de bronze aux Euros. Cependant, son très bon début de saison pouvait laisser espérer davantage, et sa prestation aux Mondiaux fut relativement anonyme. 
Son compatriote Michal Brezina a connu une saison en demie-teinte, avec une préparation retardée par des blessures. Trop juste aux Euros malgré un bon programme court, il a cependant laissé une forte impression lors des Mondiaux, avec deux quadruples sauts réussis (boucle piquée et Salchow) lors du programme libre. Son manque d'endurance l'empêche de prétendre au podium, mais cela lui permet déjà d'envisager la saison prochaine avec beaucoup d'ambition.
 
Même constat pour Javier Fernandez, qui réalise également deux  quadruples sauts différents lors des Mondiaux et rentre pour la première fois de sa carrière dans le top 10. Il peut très vite s'affirmer comme un prétendant aux podiums internationaux.
 
Kevin Van der Perren et Samuel Contesti obtiennent une nouvelle place d'honneur aux Euros, mais le bilan fut plus mitigé lors des Mondiaux. Patineurs d'expérience, ils ont entamé la dernière phase de leur carrière. 
 

France

Côté français, Alban Préaubert monte une nouvelle fois sur le podium national, derrière Joubert et Amodio. C'est pour lui une saison réussie, même si sa dixième place aux Euros peut laisser quelques frustrations. 
 
Chafik Besseghier a montré, notamment au Bompard, qu'il pouvait s'affirmer au plus haut niveau international. Son patinage est plus complet, et son aisance technique est souvent impressionnante. Il doit encore gagner en régularité pour parvenir à enchaîner les compétitions.  
Romain Ponsart a nettement progressé au fur et à mesure de la saison : après avoir réussi un triple Axel lors du championnat de France, il a réalisé un quadruple saut pour remporter le titre national chez les juniors. Il dispose des atouts techniques pour concurrencer Besseghier, alors que les deux patineurs devraient pouvoir prétendre très vite aux sélections internationales, en vue des Jeux de Sotchi.
Malgré un succès aux Masters d'Orléans en junior, le bilan est plus mitigé pour Thomas Sosniak. L'absence de triple Axel à son répertoire lui sera forcément préjudiciable. 
 
Pour la génération suivante, on peut noter les performances prometteuses de Simon Hocquaux et Charles Tétar. Mais il leur faudra sans doute plusieurs années avant d'approcher le niveau senior. 

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