Interview d’Eric Millot à Los Angeles

Quatre fois champion de France au début des années 90, l’élégant Eric Millot a laissé un très bon souvenir dans la mémoire des passionnés de ce sport. Médaillé de bronze lors des Championnats d’Europe en 1993 et lors de la première édition de la Finale du Grand Prix à Paris en 1996, il est le premier patineur à avoir réussi la combinaison triple boucle-triple boucle en compétition. Après huit Championnats d’Europe, six Mondiaux et deux Jeux Olympiques, le Rémois avait décidé de passer pro en 1997 pour devenir un an plus tard vice-champion du monde professionnel. Résident américain depuis plusieurs années et entraîneur à San Diego près de la frontière mexicaine, sa patinoire a accueilli l’équipe de France pendant une semaine avant les Championnats du Monde. Âgé maintenant de 40 ans et Team leader de l’équipe de France à Los Angeles, Eric a accepté de répondre aux questions de Passion Patinage…

(Propos recueillis par Brice Dequaire) 

Eric Millot à Los Angeles (Photo BD)

1/ C’est la première fois que tu étais Team Leader, quel a été ton rôle auprès de l’équipe de France ici à Los Angeles ? Comment as-tu apprécié la compétition ?

San Diego (Photo BD)
Ça s’est très bien passé, j’ai essayé d’être très proche des athlètes et des entraîneurs au quotidien et de leur apporter un support moral et physique afin de les réconforter, de les soutenir et de maintenir leur motivation. Les résultats des patineurs sont, je pense, satisfaisants. D’un point de vue quota olympique, puisque tout le monde parle de ça, nous aurons deux garçons, deux couples de danse, un couple artistique et peut-être une fille, c’est bien parti pour en tout cas (ndlr : interview réalisée le jour du libre dames). Les athlètes sont restés très concentrés, j’ai trouvé une équipe motivée, déterminée et travailleuse. Après, les performances, c’est un Championnat du Monde, avec des tensions et des pressions. Nous savons que sur le moment, il y a plus que la performance : il y a les autres compétiteurs, le jugement, il y a beaucoup de paramètres qui rentrent en ligne de compte. Je laisse soin à la direction technique de la Fédération Française de tirer les conclusions de la compétition dans l’optique des J.O. 

 

2/ Pour s’acclimater au décalage horaire et à la chaleur et pendant près d’une semaine, l’équipe de France s’est entraînée dans ta patinoire à San Diego. Comment s’est passé ce stage de préparation ? Pour quelle raison la fédération a choisi ta patinoire ?

Nous avions la possibilité de leur offrir une patinoire et un personnel à disposition, six heures de glace par jour, une salle de danse et d’échauffement. Les conditions étaient idéales pour s’acclimater au décalage horaire. Il y a d’autres centres en Californie, je crois que l’idée de départ, c’était de leur donner un centre sans trop de pression, sans avoir une autre équipe internationale. Ils ont eu l’occasion et la chance de s’entraîner en pouvant se concentrer sans avoir de distraction. Ce point était très important. 

 

3/ Tu es passé professionnel après les Championnats du Monde de Lausanne en 1997. Peux-tu nous raconter ton parcours ? Tu résides maintenant aux Etats-unis. Qu’est-ce que tu as fait dans le milieu et en dehors du patinage ces douze dernières années ?

Je suis papa, j’ai une fille qui a maintenant 14 ans et un petit garçon qui a trois ans et demi, qui lui est américain puisqu’il est né aux Etats-Unis. A la suite des Championnats du Monde de 1997, j’avais un agent qui s’appelait Michael Rosenberg (Marco Entertainment) qui m’a fait venir aux Etats-Unis. Pendant les quatre premières années, je suis allé vivre à Palm Desert en Californie à côté de Palm Springs, dans une oasis au milieu du desert entourée de palmiers, c’était féerique, le dépaysement complet.

J’ai beaucoup travaillé, j’ai fait plusieurs compétitions professionnelles, des tournées à travers les Etats-Unis. Ensuite pendant sept ans, je suis retourné au Japon, en Europe et j’ai commencé à entraîner à San Diego. J’entraîne à temps complet maintenant, j’ai 31 élèves, des américains, j’ai également une petite canadienne. J’entraîne aussi le champion du Mexique Luis Hernandez et le patineur philippins Michael Dimalanta, ils ont tous les deux participé au programme court de ces Championnats du Monde. Pour des raisons éthiques, je n’ai pas pu être à la fois Team Leader de l’équipe de France et entraîneur de ces deux patineurs ici à Los Angeles. Ma vie aux Etats-Unis en temps qu’entraîneur est très indépendante. J’ai été engagé pour relever le niveau de compétition dans la patinoire de San Diego. 
 

4/ Quel est le niveau de tes élèves ?

J’ai cinq élèves qui sont en nationaux (ndlr : le niveau minime-espoir est équivalent aux "juniors nationals" aux Etat-Unis). Les compétitions régionales aux Etats-Unis qui pourraient s’apparenter aux championnats de ligue français ont la taille d’un championnat national en France. Le patinage est très coté aux Etats-Unis, surtout dans le sud de la Californie, le niveau est très élevé. J’enseigne beaucoup, je passe 9 à 10 heures par jour sur la patinoire. 
 

5/ As-tu acquis la nationalité américaine comme Surya Bonaly ?

Non, je n’ai pas acquis la nationalité américaine, mais j’ai fait la demande. Mon coeur est français, d’ailleurs quand le président de la fédération française Didier Gailhaguet m’a contacté pour devenir le Team Leader ici à Los Angeles, je n’ai pas hésité. Malgré tout je vis ici, je paye mes taxes, j’ai une maison, je veux aussi avoir un regard sur la vie politique et m’impliquer.
 

6/ Souhaites-tu renouveler l’expérience et te réinvestir auprès des patineurs français en tant que Team Leader ou dans un autre rôle ?

Il semblerait qui cela se soit très bien passé, les patineurs sont très heureux de m’avoir eu à leur côté. Si la fédération me demande de les rejoindre une nouvelle fois, je serais présent avec plaisir. 

L’équipe de France à San Diego avant Los Angeles en compagnie des entraîneurs et de Jean-Roland Racle (Photo Nathalie Péchalat)

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