Mondiaux 2018 J2 : l’or pour Aljona et Bruno, le bronze pour Vanessa et Morgan !

Que d’émotions pour ce libre couple ! Aljona Savchenko et Bruno Massot emportent l’or avec un programme anthologique, devant Evgenia Tarassova et Vladimir Morozov, alors que Vanessa James et Morgan Ciprès ramènent le bronze !

 

Pour mieux revivre cette soirée, je vous propose de reprendre l’ordre chronologique… Passons les premiers couples pour rentrer directement dans le vif du sujet avec le top 10.

 

Alexa Knierim et Chris Knierim s’élancent sur la glace. Pas leur meilleure saison, pour les championnats américains, mais si le thème sur ‘Ghost’ est bien patiné, ça peut fonctionner. Le triple Twist d’entré est ample… mais seulement niveau 2, et le quadruple me manque. Sur les sauts parallèles Chris fait carton plein, alors qu’Alexa retourne le triple Salchow. Elle se reprend bien sur la séquence de deux double Axel, mais ne rentre pas assez vite dans la rotation de la spirale de la mort : la pointe arrière de sa lame accroche la glace, et c’est la chute. Ce ne sont pas les sauts lancés qui peuvent les sauver, le Salchow est accroché, et le flip chuté. Alexa sort en pleurs, Chris essaie de la consoler autant qu’il peut. Mention très bien pour le public, qui le soutient jusqu’à l’obtention de leurs notes, qui logiquement ne sont pas bonnes : ils terminent avant dernier avec 182.04 points. Vu le niveau assez homogène des couples américains, la bataille sera rude l’année prochaine, il n’y aura qu’un seul quota…

Place aux patineurs Chinois Xiaoyu Yu et Hao Zhang, sur le thème de Stars Wars. Choix assez original puisqu’ils évitent les musiques archi-connues, l’ensemble est coulé et fluide. Xiaoyu est à la peine dès le premier élément, Salchow tourné en double. Le Twist est par contre majestueux, niveau 4, et la combinaison qui suit est assurée. Je regrette un peu le montage du programme avec les deux sauts lancés à la suite, mais ça passe bien, c’est une petite revanche sur les Jeux ! Je rentre peu à peu dans leur programme, ils ont de belles qualités de patinage, mais je ne les sens pas vraiment impliqués, il manque un petit quelque chose, un peu plus d’osmose par exemple, ou plus d’expression au niveau du visage. Ca reste toute de même un bon programme, qui leur permet de terminer 7eme avec 203.36 points (et premier couple chinois).

‘Un ange passe’ pour Kirsten Moore-Towers et Michael Marinaro… Choix musical tout en douceur. Le Twist manque un peu de hauteur à mon goût (noté niveau 2 seulement), par contre pour le reste c’est un sans-faute. Kirsten expliquait qu’étant touchée à la cheville, leur préparation pour ces mondiaux avait été tout sauf évidente, mais sur la glace ça ne se voit pas. Chapeau ! D’autant qu’il tentent beaucoup, notamment une combinaison double Axel – torren – triple Salchow. Le piqué parallèle est également correct, comme les sauts lancés, boucle et Salchow en début et fin de programme. Beaucoup d’ambition, un bon résultat, l’archétype du programme lyrique et délicat qui fonctionne quand tout réussit, un ange est effectivement passé ! D’autant qu’ils représentent ici la relève canadienne : ‘C’est un peu étrange de ne pas avoir Meagan et Eric avec nous sur cette compétition, mais nous sommes prêts à emmener les couples canadiens jusqu’aux prochains Jeux à Pékin en 2018’ confie Kirsten. Et on les croit ! Ils font la plus belle remontée du jour, de la 10eme place du court à la 4eme place du libre, pour terminer 6eme au final avec 204.33 points.

 

Il y a comme une impression de déjà vu avec le trio qui suit, car comme sur le libre danse des mondiaux de Nice en 2012, trois couples sont dans un mouchoir de poche, avec 9 et 5 dixièmes d’écart entre eux !

Je dois avouer avoir un faible pour le thème de ‘La La Land’ utilisé par Kristina Astakhova et Alexei Rogonov. Hormis un retournement sur le triple Salchow pour Kristina, et un ‘touch’ sur le triple Salchow lancé, l’ensemble est homogène, frais et plaisant. Dommage par contre de prendre une déduction pour dépassement du temps imparti. Ils sont 8eme avec 202.16 points.

Il aurait fallu un programme parfait et un sacré concours de circonstance pour que Valentina Marchei et Onderj Hotarek montent sur le podium, mais cette occasion n’était à ne pas manquer ! Le public était de toute façon acquis à leur cause, en rajoutant le thème musical ‘Amarcord’ de Nino Rota le résultat était plus que prometteur ! Le triple Twist passe, le public s’époumone ! Ce sera la même chose pour à chaque autre élément réussi… mais pas sur les sauts individuels : Valentina met deux pieds sur le triple boucle piqué, et chute sur le triple Salchow. Le public y croit encore et exulte sur le triple Lutz lancé réussi, mais ils ne progresseront pas au classement. D’ailleurs, en terminant à la fois 8eme du court et du libre, ils ne sont que 10eme au final avec 202.02 points.

Encore un thème tout en douceur, cette fois-ci pour Cheng Peng et Yang Jin : ‘Butterfly lovers’. Les Chinois ne commencent pas très bien leur libre… Ils ne sont pas du tout à l’aise sur les sauts individuels : la combinaison triple boucle piqué-double boucle piqué est simplifiée, et ils ne tentent que double Salchow. Bel effort sur le Twist, qui ne récolte ‘seulement ‘ qu’un niveau 3. Nouvel accroc sur le triple Salchow lancé, sur deux pieds, la rotation étant enclenchée un peu trop tardivement. On est tellement habitué à l’excellence des Chinois sur les sauts lancés ! Le boucle lui est heureusement superbe. De bons niveaux techniques, avec des niveaux 4 partout (sauf sur le Twist). Ils ont une très jolie musique, un peu longuette sur la durée du programme, l’exécution est bonne mais ils ne m’emportent pas. Ils sont au final 9eme avec 202.07 points (10eme du libre).

 

Nicole Della Monica et Matteo Guarise clôturent l’avant dernier groupe. Logiquement, le public  s’enflamme ! Et ce même malgré les petites erreurs de ci de là, les Italiens sont très soutenus, sur chaque élément. Le Twist d’entrée est (généreusement je trouve) comptabilité niveau 4, il manque un peu d’ampleur. Le Salchow parallèle est tenu, par contre Nicole chute sur le boucle piqué… le podium s’éloigne. Ca aurait été difficile de toute façon, mais en patinant à la maison, quelle émotion cela aurait pu être. Nicole masque également la réception du triple Salchow lancé avec un grand aigle, mais le déséquilibre était là. Leur musique de ‘Tree of life’ change du répertoire habituel, la chorégraphie est très ‘aquatique’, à l’image des costumes bleu-vert très près du corps. Mention spéciale pour la pirouette parallèle en synchronisme parfait. Ils se sont bien battus, en étant complètement dans leur programme. On ne pouvait rêver mieux pour eux sur cette fin de saison ! Ils battent leur meilleur score de la saison et prennent une très belle 5eme place (206.06 points).

 

Les lumières s’éteignent, la patinoire seule est colorée… le dernier groupe est annoncé ! La tension monte, le podium est là sous nos yeux, sauf grosse désillusion. Mais un des quatre couples n’y montera pas. On croise les doigts…

L’échauffement commence. Pas trop de chutes, les patineurs sont dans la glace. Le public est à fond ! Vanessa et Morgan échauffent le Salchow lancé, avec un double pour commencer, puis un triple, magnifique. Pas de quadruple… pour garder de l’énergie ? Ou feront-ils plus simple et moins difficile physiquement, notamment avec le problème au cou de Morgan ?

Ca y est, la machine est lancée… Natalia Zabiiako et Alexander Enbert entament leur programme. Ils ont énormément progressé cette saison, ils sont beaucoup plus réguliers, notamment sur les sauts individuels. Même s’ils ont les concurrents directs des français pour la médaille, je leur souhaite le meilleur, après une belle saison et le bronze européenne, la médaille mondiale est peut-être au bout du programme ? Première difficulté, le triple Twist est propre, niveau 3 pour le jury. Alexander ne fait que triple-double-simple sur la combinaison et pose la jambe libre sur le triple Salchow (incomplet), pas de grosse erreurs mais ce sont des dixièmes qui s’envolent. Même verdict pour le triple boucle lancé, avec deux mains sur la glace pour stabiliser la réception. Le triple flip est superbe par contre, la pirouette parallèle quelque peu désynchronisée. Programme correct au final, on est toujours dans le registre hyper classique de l’école russe, le petit effet de costume sur le changement musical fait son petit effet. Maintenant que la technique individuel rentre, il reste à améliore la spirale de la mort, de niveau 2 seulement, et de booster le plus dur, la projection vers le public. Ils sont finalement 6eme du libre, et 4eme au final… mais ça on ne le sait pas encore !

Le cœur bat plus vite, l’émotion commence à piquer les yeux, Vanessa James et Morgan Ciprès rentrent sur la glace. La médaille mondiale est au bout des quelques minutes qui viennent… sauront-ils gérer la pression, et éviter la déception des championnats d’Europe ?

Triple Twist impeccable, niveau 4, rien que sur cet élément quels progrès ils ont fait ces dernières années… Combinaison triple-double-double, oui, ça passe. Vient la prise d’élan du Salchow lancé, Vanessa monte très haut, comme sur un quadruple, mais ne fait que trois tours, ils ont donc assuré. Ou plutôt voulu assurer, Vanessa a tellement de place en l’air qu’elle a beau ouvrir plus tôt, la réception est catastrophique, la chute assez violente. Ne rien paraître, repartir tout de suite, ça aussi ils l’ont intégré, oubliés les programmes où ils baissaient les bras. Et le ‘Sound of silence’ de Disturbed prend toute sa puissance, les notes emplissent la patinoire, Vanessa et Morgan électrisent le public. Triple Salchow parallèle correct, pas d’erreur comme hier, triple flip lancé glissé… c’est bon, c’est bon ! La spirale n’a pas la côte habituelle (niveau 2), mais ils sont totalement dans leur programme. Reste la pirouette de couple, le porté final. C’est fini ! Ils ont tenu le coup ! La médaille est dans la poche ! Ils quittent la glace le sourire jusqu’au oreille, du côté des tribunes c’est la banane également, mais aussi l’heure des mouchoirs. C’est confirmé, ils prennent la première place provisoire ! Le bronze au pire… ils l’ont fait !

 

Ils ont annoncé être fatigués, Aliona Savchenko et Bruno Massot, Bruno expliquant même hier que des erreurs aujourd’hui ne seraient pas vraiment graves pour eux. Fatigués, vraiment ? Dès les premières notes de ‘La Terre vue du ciel’, ils sont ailleurs. Oubliés la fatigue, les Jeux, l’or olympique, ils sont simplement là, à Milan, pour leur dernier libre de la saison, peut-être de leur carrière. ‘La Terre vue du ciel’… le titre est on ne peut mieux trouvé : de leur petit nuage, la Terre doit tout simplement ressembler à une salle pleine à craquer, remplie de public prêt à être embarqué avec eux. Car ils sont vraiment sur leur petit nuage ! Allez, il y a bien la réception du triple Salchow lancé, un peu tirée, où l’expérience d’Aljona parle pour tenir le tout. Ce sera d’ailleurs le seul élément du programme à ne pas flirter avec la perfection, le 5eme juge sortant un +1, perdu dans la forêt des +2 et +3 des protocoles. Tout le reste est parfait, des niveaux 4 partout, ils améliorent leur note technique de base de 22 points, c’est un record à lui seul ! Aucun problème sur les sauts parallèles (triple boucle piqué en combinaison, triple Salchow) ni sur le triple flip lancé, ils explosent leur record sur le libre, sur la compétition, ils explosent tout en fait. C’est on ne peut plus logique, même si cela surprend Bruno qui écarquillent les yeux en découvrant ses notes dans le Kiss and Cry. Doublé Jeux Olympiques – championnats du monde, et dire qu’ils ont fait le déplacement à Milan pour patiner pour leurs familles et amis qui n’ont pas pu faire le déplacement en Corée. Comme quoi travailler les grosses difficultés comme triple Axel et quadruple lancés avaient un sens, mais qu’ils n’en avaient pas vraiment besoin en fin de compte.

Du coup, la soirée ressemble assez au libre couple des championnats d’Europe de l’année passée. Avec deux excellents programmes des Français et des Allemands, l’émotion est montée tellement haut qu’en fait, la journée est déjà remplie, le reste n’est que du bonus.
Il reste le programme d’Evgenia Tarassova et Vladimir Morozov, mais peu importe qu’ils changent le podium provisoire ou non, ils vont bien patiner, on le sait, on leur souhaite, ne serait-ce que pour conjurer la déconvenue du libre olympique et le visage en pleurs d’Evgenia dans le Kiss and Cry. Il y a quelques accrocs sur les sauts parallèles, avec notamment simplement un double Salchow, certes… il y a surtout un quadruple Twist, la plus grosse difficulté tentée sur ce libre. Les niveaux s’envolent, les composantes également, cela reste néanmoins derrière les Allemands et leur note maximale en ‘performance’ et ‘interpétration’. On ne peut pas leur reprocher de sortir de leur zone de confort, le thème du ‘Candyman’ de Christina Aguilera est tout de même ‘légèrement’ éloigné de leur musique du court sur Rachmaninoff. Pas sûr que ce soit tout à fait leur style, mais bon, ils tentent. Espérons que l’année prochaine ils trouvent la combinaison parfaite entre musique et chorégraphie qui soit cohérente avec leur personnalité et leur expression artistique, et à la hauteur de leur talent.

 

Fin du suspens : Evgenia et Vladimir empochent 144.24 points sur le libre, 225.53 point au final, c’est le titre de vice-champion du monde derrière Aljona et Bruno. Ils devancent donc Vanessa et Morgan, c’est logique, mais c’est la première médaille française en couple depuis le bronze d’Abitbol/Bernadis à Nice en 2000 ! Quelle soirée !