La collision avec Han Yan à la Coupe de Chine avait laissé de lourdes traces sur le corps de Yuruzu Hanyu. Au NHK, pas encore complètement remis du choc, il avait terminé au pied du podium. Même s'il ne s'estime pas encore à 100%, Yuzuru a semble-t-il tourné la page, et laisse ses concurrents à plus de 30 points derrière lui. Derrière, c'est le grand chamboule tout !
Hormis le triple Lutz qui lui joue des tours, avec une chute sur le court et une autre sur le libre, Yuruzu Hanyu a quasiment atteint la perfection. Ou alors les chutes étaient pour garder quelque chose à travailler à l'entraînement avant les grandes échéances… Sur le programme court, la situation était assez confuse : Yuzuru chute mais vire en tête, alors que les patineurs suivants ont dans l'ensemble patiné plus propre. Sur le libre, pas de doute possible : il y avait Yuzuru et les autres. C'était un festival ! Certes, la musique du 'Fantôme de l'Opéra' aura été entendue et ré-entendue ce week-end à Barcelone, mais Yuzuru entame son programme avec une telle attaque sur les éléments ! Et tout passe… deux quadruples différents, triple Axel en combinaison avec triple boucle piqué et avec demi boucle-triple Salchow, le public suit comme un seul homme. A l'annonce de ses notes Yuzuru explose de joie, et c'est bien mérité ! Il faudra un adversaire très fort pour aller le chercher cette année.
Et si ce patineur était Javier Fernandez, son partenaire d'entraînement chez Brian Orser ? Certes, Javier a tout pour lui, notamment une excellente tenue du corps dans la phase de vol des sauts, et cette année deux programmes très différents et très chargés techniquement. Par contre, patiner à domicile, une grande première pour lui sur un si grand événement, semble l'avoir déboussolé lors du court : chute sur le quadruple, combinaison double-triple, Javier pointait à la 5eme position. Sur le libre, la pression est mieux gérée, malgré un public tout aussi déchaîné pour son héros. Deux quadruples, un triple Axel, une combinaison triple-triple, si on oublie la dernière combinaison, avortée, son ' Barbier de Séville' était très enlevé. Un triomphe dans la salle, surtout que patinant dans les premiers, le public a pu saluer comme il se devait la progression de Javier à fur et à mesure que les autres patineurs se plaçaient derrière lui.
Dans le grand charivari du classement, celui qui tire son épingle du jeu est Sergei Voronov. Auteur d'une très bonne compétition dans l'ensemble, son court sur la 'Danse Macabre' de Saint-Saens est tout à fait correct, avec les difficultés majeures : quad-triple, triple Axel, mais 'seulement' un triple boucle. Sur 'This is a man's world' et le 'Come together' des Stones, Sergei présente un tout nouveau registre dans son libre, et se fait plaisir sur la glace. Tout sourire, à fond dans l'interprétation, cela semble être sa recette pour réussir ! Lucide, il gère efficacement son entrée de programme pour replacer la combinaison triple-triple sur ce qui devait être le deuxième quadruple.
La deuxième moité du classement est nettement moins réjouissante. Brillant sur le court, en étant le seul patineur à tenter et à réussir deux quadruples, Maxim Kovtun a déçu sur le libre. Si sur le papier son programme semble correct, une certaine lenteur dans l'exécution, et des sauts qui semblent passer tout juste n'ont pas laissé une impression indélébile. Troisième du court, cinquième du libre, il termine au pied du podium.
Du côté japonais, ce n'est plus de la déception mais quasiment du dépit. Takahito Mura est passé complètement à côté de son programme court, avec une chute sur le quadruple d'entrée et la combinaison triple Lutz-triple boucle piqué retournée. A noter lors de cette mauvaise prestation l'attitude exemplaire du public barcelonais qui n'a cessé d'encourager le japonais et l'a soutenu jusque dans les toutes dernières minutes. Pour un public peu habitué aux grandes compétitions, ça force le respect.
Dans le libre Takahito se reprend avec deux quadruples boucle piqués, mais également un faux départ sur le boucle et une dernière combinaison non entièrement comptabilisée, car le demi boucle entre les Salchow s'est transformé en retournement suivi d'un trois. Quatrième du libre, il est cinquième au final.
Tatsuki Machida a pour lui une grande sensibilité et une réelle capacité à s'investir dans l'interprétation de la 9ème symphonie de Beethoven. Généralement solide techniquement, la chute d'entrée sur le quadruple boucle piqué a celé son destin : trois chutes au final, un patinage trop lent, avec en conclusion une dégringolade vertigineuse puisqu'il termine bon dernier, avec quasiment 20 points de retard, alors qu'il était deuxième du programme court. C'est l'expérience qui rentre…
Yuzuru : j’étais un peu nerveux pendant ce programme, mais je suis très content du résultat ! Je suis content d’avoir pu patiner avec tout mon corps, ce n’était pas vraiment arrivé depuis mon accident avec Yan Han. J’ai eu beaucoup de soutien de tout le public aujourd’hui ici, j’ai aussi reçu beaucoup de message de tous mes fans de par le monde, je les remercie beaucoup, ca m’a beaucoup aidé.
A la fin de mon programme, j’étais vraiment, vraiment fatigué, je suis parti sur le triple Lutz, mais mon corps n’a pas suivi complètement. Il va falloir que je fasse attention car c’est la même erreur que dans le court hier, et les championnats nationaux vont arriver vite ! Il faut que j’ajoute aussi un deuxième quadruple boucle piqué dans la deuxième moitié de mon programme libre.
Javier : Enfin, une compétition en Espagne où je termine sur le podium (ce n’était pas le cas lors des Grand Prix Junior, ndlr). Peut être que les grandes compétitions devraient maintenant se tenir ici ! J’ai travaillé très dur pour être sur le podium, c’était vraiment difficile hier d’être 5eme, j’attendais beaucoup plus de moi-même. Dans l’ensemble, je ne peux qu’être satisfait.
Surtout, l’ambiance était phénoménale ! C’est peut être ce qui m’a rendu tendu hier. Les autres patineurs ont beaucoup plus l’habitude d’avoir de grands évnènements dans leur pays, pour moi c’est la toute première fois, je ne m'y attendais pas à ce point.
Sergei : Cette année j’ai patiné après Yuruzu au Japon, et après Javier en Espagne, question ambiance je suis prêt à tout maintenant ! Le public était tellement en liesse ! Ca m’a rendu un peu nerveux, mais j’ai reussi à gérer cette petite pression supplémentaire.
Mon entraîneur, mon chorégraphe Alexander Zhulin et moi-même, on voulait un autre style pour mes programmes. Auparavant, j’étais un patineur dans la pure veine classique. Il fallait changer ça. Et les paroles sont autorisés maintenant, c’est plus simple ! Même si au début, avec mon choix de musique, j’ai pensé que je n’y arriverai jamais… et petit à petit j’ai pris du plaisir à patiner dessus, je comprends complètement les paroles, c’est vraiment des bons moments.